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C’Mon Billy, P J Harvey

Sur la photo qui orne le boîtier du cd du troisième album de Polly Jean Harvey, le grandiose “To Bring You My Love”, on la voit les yeux clos, les cheveux épars, vêtue d’une robe rouge brillante, très décolletée, rouge comme ses lèvres entrouvertes. Elle semble flotter sur l’eau, telle une Ophélie moderne offerte et féminine, elle dont le premier album* s’appelait “Dry”.
P J Harvey est pourtant au bout du rouleau, juste avant d’enregistrer ce disque ; son trio est dissous, elle est déprimée. Elle s’enferme dans sa maison du Dorset pour écrire les chansons de “To Bring You My Love”, qui va représenter une cassure stylistique.
Pour “C’Mon Billy”, elle convoque un quatuor à cordes. Elle y intervient à l’orgue et à la guitare, la guitare lead étant confiée à Joe Gore. La batterie et les percussions sont l’affaire du fidèle John Parish, qui va également co-produire, avec Flood et P J elle-même.
Elle s’adresse à Billy en lui avouant son amour, ce qui n’est pas courant chez elle, et en lui demandant de venir reconnaître son fils.
C’est une guitare acoustique qui donne le ton et qui soutiendra la voix de Polly Jean pendant toute la chanson, le rôle complémentaire étant tenu par le quatuor à cordes. Cette dichotomie guitare/quatuor à cordes structure tout “C’Mon Billy” et se retrouve dans l’imagerie du clip qui illustre cette chanson.
Tout se passe comme si Polly Jean**, sans renier la sécheresse, voire la sauvagerie de ses premiers albums, ajoutait, avec ces cordes, une sensualité, qu’elle n’avait, jusque là, jamais osé dévoiler de la sorte. Son chant, lui-même, a pris une tonalité différente, plus théâtrale, plus démonstrative. Ce n’est plus seulement ses pensées que Polly Jean dévoile, et nous fait partager, c’est son corps, et sa féminité. Et c’est une très bonne nouvelle, car cela aboutit à faire de “To Bring You My Love”, probablement son plus grand disque, à ce jour.

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*voir ma chronique de “Dress”

**Elle assume maintenant ses deux prénoms à chaque endroit du livret qui accompagne le cd, elle que l’on n’avait jusque là connue que par ses initiales P J.

OldClaude

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OldClaude

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