“Dry”. Sec. Le 1er album de cette jeune femme du Dorset, dans le sud-ouest de l’Angleterre. Sec, comme un coup de trique. Pas de concession à une quelconque beauté fabriquée ou arrangée. Une production, euh, disons, minimale pour ne fâcher personne.

Regardez les trois photos qui accompagnent le cd : la bouche de Polly, avec ce rouge qui déborde, rien qui appelle le baiser ou la sensualité, le centre de l’image étant ce menton blanc et peu expressif ; le tube de rouge à lèvres, à l’intérieur, avec ce rouge qui existe à peine, enfoui dans le tube de métal sec et brillant. Et elle, nue, au dos du boîtier, maigre et sèche, rien d’érotique, qui nous regarde tranquillement, droit dans les yeux ; pas la moindre invitation.

Et donc, il faut se coltiner avec le disque, sec, rugueux, avec ces chansons qui ne viennent pas nous chercher, mais qu’il faut prendre à bras le corps, et c’est difficile car il y a des piquants partout, comme si on avait affaire à une portée de hérissons.

Mais, je vous en prie, contournez les piquants, allez vers le ventre (ou le museau) du hérisson, là où c’est doux et chaud.

Car ces chansons, et “Dress”, en particulier, sont chaudes et intimes ; la sécheresse et les piquants sont là pour nous demander d’aller au-delà de ce qu’elles peuvent avoir de repoussant. C’est à prendre ou à laisser. Et pour moi, “Dress” est une chanson extraordinairement attachante.

Et le moins que l’on puisse dire c’est que les paroles de “Dress” ne vont pas dans le sens que l’on attendrait : voilà une jeune fille qui essaie de porter la robe rouge que son copain lui a offerte ; et la robe est trop serrée, ça ne lui va pas, elle ne se sent pas bien avec cet accoutrement, c’est un fiasco, la relation est un fiasco. P J Harvey ou l’anti-glamour, le refus de se soumettre à ce qui se fait ou ce qui ne se fait pas, les poils sous les bras (comme Patti Smith, à qui Polly Jean a pu être comparée).

Il n’est donc pas étonnant, qu’en 2016, Miss Harvey soit toujours là, avec, derrière elle 11 albums en studio, dont je reparlerai. Cette femme n’est pas un phénomène de mode, ni même simplement une artiste ; Polly Jean Harvey est une star.

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