Lorsqu’est arrivé dans les bacs Bleu Pétrole, il restait à Alain Bashung un peu plus de 11 mois à vivre.

Rompant avec les deux albums studio précédents, Fantaisie Militaire (dont je vous ai abondamment parlé) et l’Imprudence (album difficile et austère, dont je ne vous ai pas parlé), Bleu Pétrole, produit par l’Américain Mark Plati,  revient vers la forme plus “classique” d’une chanson française mâtinée de rock ; Bashung n’y a qu’un rôle ─ admirable ─ d’interprète, et s’en remet, pour l’écriture, à Gérard Manset, mais également à Gaëtan Roussel, en rupture de Louise Attaque, auteur-compositeur de “Sur Un Trapèze”.

Je m’étais permis, à la lumière d’une analyse des textes de Fantaisie Militaire* de mettre en évidence ce que je pensais être les sous-entendus autobiographiques de cet album essentiel. Rien de tel avec Bleu Pétrole ; Alain est un homme, sinon serein et apaisé, du moins rassuré quant à ses options affectives et amoureuses, et cet album est celui d’un artiste qui n’a plus rien à prouver, tout simplement parce qu’il est arrivé au sommet de son art.

C’est ainsi que “Sur Un Trapèze”, porté par la guitare inspirée de Gaëtan Roussel, mais dans laquelle interviennent de nombreux musiciens, (dont Marc Ribot) est une sorte de ballade folk sans prétention, suggérant à petites touches la précarité ou l’équilibre difficile (« Et que l’on tient tous les deux sur un trapèze ») de la plupart des situations humaines, tout en nommant l’une des seules richesses apte à faire face aux « pirates [qui] nous assiègent », c’est-à-dire « Et que notre amour, c’est le trésor ». Oui, en 2008, Bashung était encore confiant en l’avenir.

*Voir mes chroniques “La Nuit Je Mens” et “Angora”.

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