Le 10 juillet 2017, j’étais, bien entendu, sur un très confortable siège à la Philharmonie de Paris pour assister au concert que devaient donner Sufjan Stevens (Sufjaaaaan !!), Nico Muhly, Bryce Dessner et James McAlister, réunis autour du projet Planetarium.

Une très sérieuse institution musicale hollandaise avait contacté Nico Muhly, compositeur et arrangeur américain, afin d’écrire une pièce musicale ayant pour thème l’espace. Nico avait rameuté ses copains, Bryce Dessner, guitariste du groupe The National*, et Sufjan Stevens, qu’on ne présente plus, qui était arrivé avec son batteur fidèle, James McAlister. On peut dire, un peu schématiquement que Muhly est responsable de la musique, avec d’importantes participations des trois autres, et Stevens, des paroles.

Je ne sais plus combien de temps ça a duré, mais toute la salle a écouté dans un silence religieux, comme s’ils étaient à l’Opéra. Moi, j’ai trouvé que Sufjan avait chanté un peu médiocrement, mais comme vous vous en doutez, je lui pardonne tout. À la fin, “standing ovation”, applaudissements pendant 10 minutes, bravos et pâmoisons.

Globalement, je me suis fait un peu chier.

Et là, j’ai devant moi le disque Planetarium ; je l’ai écouté une fois, pas deux, 76 minutes, il faut quand même se les avaler, et j’avais choisi la dernière des 17 plages du cd, “Mercury”, histoire de vous en dire un mot. Mais, maintenant que je suis à l’ouvrage, consciencieusement, je réécoute l’ensemble.

Il n’y a pas à dire, il y a de beaux moments ! Les quatre hommes utilisent un nombre impressionnant d’instruments, claviers divers et variés (il n’y a que Dessner qui ne lâche pas sa guitare) et ils sont secondés dans leurs tâches par un quatuor à cordes et pas moins de sept trombones. Alors, il y a ce qu’on pourrait appeler des “ambiances musicales”, c’est-à-dire, de mon point de vue, un remplissage assez vain avec de grandes plages musicales où rien ne vient ni heurter l’oreille, ni malheureusement, l’accrocher.

Il y a, également, des parties chantées par Sufjan (Sufjaaaaan !!), et dans le disque, il chante plutôt bien, mais ce n’est pas sa musique, c’est lisse, c’est propre, ça manque d’âme, d’inspiration, ça manque de musique.

J’ai eu la curiosité d’aller lire les compte-rendus ou les critiques d’un certain nombre de gens dont c’est le métier de nous tenir au courant de ce qui se fait de mieux dans le domaine de l’Art et de la Musique. Tout le monde adore, bien sûr ; on n’est plus dans la pop music, on est dans la Culture. À propos de ce que fait Sufjan Stevens, ces éminentes personnalités, remarquant qu’il utilise parfois des dispositifs de traitement du signal vocal (vocoder, auto-tune) n’ont pas manqué de rapprocher Planetarium de The Age Of Adz. (2010)**. Voilà qui me fait bondir et qui est une nouvelle preuve d’une façon très superficielle d’écouter de la musique ; on repère un son, ça fait penser à un son identique qu’on a entendu ailleurs ; il ne reste plus qu’à mettre le signe “égale” entre les deux, et on a fait le boulot. À ce compte-là, on entend un piano chez Richard Clayderman, et ça fait penser à Frédéric Chopin ! J’exagère un peu.

“Mercury” est à sauver. On y entend Sufjan chanter une vraie chanson. D’ailleurs, avec ma mauvaise foi habituelle, je parierais que c’est Sufjan qui a composé ça, et pas Nico Muhly. Ce n’est pas ce qu’il a fait de mieux dans sa vie, mais il ne pouvait quand même pas trop tirer la couverture à lui, n’est-ce-pas ?

*Voir ma chronique “England”.

**Merci d’aller lire ma chronique de “Vesuvius”

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