Je vous ai parlé récemment de cet album de Radiohead, “The Bends”, et la chanson qui clôt l’album, la célèbre “Street Spirit (Fade Out)”, fait partie de mes favorites. Jolis arpèges de guitare d’Ed O’Brien, chant geignard mais bien adapté et talentueux de notre Thom Yorke. Voilà, on va pas épiloguer, hein ? Une bonne chanson est une bonne chanson, ça ne court pas les rues, et vous attendez de moi autre chose que les banalités que je viens d’écrire. Alors ? Alors, comme très souvent, je suis allé consciencieusement lire les paroles écrites par ce brave Thom. Bon, comme d’habitude, c’est pas la joie, Thom est plutôt du genre mélancolique ; cela dit, il n’est pas certain que j’aie tout compris, car, voyez-vous Thom est un grand artiste, et ses textes charrient des visions, tu vois, et c’est pas donné à tout le monde de pouvoir y accéder, tu vois, et quand il écrit « avant que nous allions tous en-dessous » ou bien « je peux sentir la mort, je peux voir ses yeux perçants », putain, ça transporte une angoisse, j’te dis pas, tu vois…
C’est alors que je suis tombé, merci WikiPedia, sur une interview du Maître en personne, l’ineffable Thom Yorke, qui m’a tout expliqué :
«[Le] cœur [de “Street Spirit”] est un mystère complet pour moi, et, vous savez, je n’essaierai jamais d’écrire quelque chose à ce point sans espoir…….Surtout moi, je détache mon radar émotionnel de cette chanson, ou alors je ne pourrais pas la jouer. Je craquerais. Je m’effondrerais sur scène……Nos fans sont plus courageux que moi de laisser cette chanson les pénétrer, ou peut-être qu’ils ne réalisent pas ce qu’ils sont en train d’écouter……..Je ne peux pas croire que nous avons des fans qui peuvent gérer émotionnellement cette chanson. C’est pour ça que je suis convaincu qu’ils ne savent pas de quoi il s’agit. C’est pour ça que nous la jouons à la fin de nos concerts. Elle me vide, elle me secoue, et ça me fait horriblement mal à chaque fois que je la joue, de regarder des milliers de personnes applaudir et sourire, inconscients de la tragédie de sa signification. Comme quand vous emmenez votre chien se faire piquer et qu’il remue sa queue sur le chemin. C’est à ça qu’ils ressemblent tous, et ça me brise le cœur…..»
Oh ben dis donc, j’suis passé à côté d’une catastrophe ; j’savais pas qu’cette chanson était dangereuse, à ce point ! Soit on fait une bouffée délirante, soit on s’transforme en clébard, mais en tout cas on n’en sort pas indemne. J’vais filer mon exemplaire de “The Bends” à ma gardienne ; elle comprend pas l’Anglais ; elle a p’têt’ une chance de s’en tirer…

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