In A Glass House est le cinquième album de Gentle Giant, et vous aviez pu constater, en lisant la chronique que je consacrais à un titre de leur album précédent, Octopus*, toute l’admiration que je porte à ce groupe.

Phil Shulman, le frère aîné, chanteur, saxophoniste, et surtout responsable des textes des 4 premiers albums, était parti, et le remplacer n’était pas dans les plans du quintette. En outre, le groupe était obligé de changer de maison de disques.

Phil apportait la sensibilité acoustique, folk, médiévale. Le départ de celui-ci allait faire de Gentle Giant un groupe plus rock, plus électrique, animé d’une ambition nouvelle.

Et, en effet, In A Glass House est un album essentiel, peut-être le plus important de Gentle Giant. Il est réputé complexe, mais ceux qui voudront bien se reporter à ma chronique précédente sur GG, déjà évoquée ci-dessus, pourront lire ce que je pense de cette prétendue complexité. Quoi qu’il en soit, la maison de disques américaine du groupe refusa de sortir l’album aux USA,  pour cause de «manque de potentiel commercial »  et les 150 000 albums écoulés là-bas le furent en import !

Il est vrai, cependant, que le morceau qui clôt cet album et qui lui donne son titre, “In A Glass House”, présente une certaine complexité, mais celle-ci est due à l’articulation de plusieurs parties et non à une complexité intrinsèque à la musique elle-même. Gentle Giant fonctionne souvent en utilisant des “motifs”**, courtes phrases musicales qui se répètent tout au long du morceau, avec des instrumentations souvent différentes.

C’est Gary Green et Ray Shulman qui entament la danse, l’un avec ses guitares, 12-cordes et électrique, l’autre avec son violon, ce dernier donnant à l’ensemble un petit air celtique. Puis Ray Shulman, sur sa basse, parfaitement secondé par la batterie de John Weathers installent un rythme rock d’une grande efficacité. Gary, merci pour le tambourin !

Kerry Minnear et ses claviers (orgue Hammond, piano électrique, piano Elektra, clavecin, MiniMoog) se chargera d’introduire la voix de Derek Shulman, lequel va vite laisser la place aux guitares, acoustiques et électriques, sans oublier une mandoline.

Le thème du début reprend, mais Derek, sur ses saxophones alto et soprano introduit un autre motif souligné par le jeu de pied de grosse caisse de John. Derek, Kerry et Ray mêlent leurs voix.

Une brutale rupture rythmique va introduire un nouveau motif, exposé par Gary aux guitares et Derek, brièvement, au chant, puis avec la voix de Kerry, soutenue par la guitare acoustique.

Puis Gary expose un motif à la steel guitar avant la reprise de Derek, toujours accompagné par la guitare électrique.

Et à la toute fin vous avez ce medley très court qui fait se succéder différents motifs issus de toutes les chansons du disque, débutant et se terminant par ce bruit de verre brisé.

Ma description est très schématique et incomplète, d’autant que tous ces motifs ne se succèdent pas linéairement mais s’enchevêtrent et s’interpénètrent ; cela dit, si j’ai pu vous donner une idée de la richesse et de l’inventivité des compositions des frères Shulman et de Kerry Minnear, mon but est atteint.

“In A Glass House” a été, semble-t-il, assez peu interprété sur scène, mais il existe un enregistrement du 5 avril 1974, capté à Münster, en Allemagne de l’Ouest, dans lequel Gary Green se montre particulièrement brillant et inspiré.

Et puis un dernier mot, qui concerne la virtuosité instrumentale de ces cinq hommes : lorsque vient le moment d’évoquer les plus grands instrumentistes des 70’s, qui pensera à citer Gary Green ou John Weathers ? Qui nommera Derek Shulman comme étant l’une des plus grandes voix du rock britannique ? Qui, surtout, citera l’un des grands maîtres des claviers de cette époque, l’incroyable Kerry Minnear, ou le fabuleux bassiste qu’est Ray Shulman ?

L’étoile Gentle Giant s’est éteinte en 1980, mais sa lumière continuera très longtemps à nous éclairer.

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Afin d’améliorer la lisibilité de ces chroniques, j’ ai décidé que les titres d’albums ne seront plus, comme je l’ai fait jusqu’à présent, et d’une façon tout à fait admise par les règles typographiques habituelles, enserrées entre des “”, mais qu’ils seront indiqués en italiques.

*voir la chronique de “Knots”

**pour reprendre l’expression de mon ami Geir Hasnes, grand spécialiste de Gentle Giant.

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