J’aurais pu intituler cette chronique : “Pourquoi enregistrer des morceaux de 8 minutes, là où 3 minutes pourraient suffire ?”

Car Death Cab For Cutie n’est pas un groupe de prog-rock*, mais bien un groupe indie, et cet album, “Transatlanticism”, leur quatrième, est également celui de la reconnaissance commerciale, et du succès.

Ce quatuor, formé dans l’état de Washington, au nord-ouest des USA, comprenait, à l’époque, Ben Gibbard (voix principale, guitare), Chris Walla (guitare, production) Jason McGerr (batterie) et Nicholas Harmer (basse).

Revenons à cette chanson qui donne son titre à l’album, lequel est un concept-album, c’est-à-dire que toutes les chansons évoquent le même thème, qui est celui de la séparation amoureuse, de l’éloignement géographique entre deux personnes qui s’aiment.

L’intelligence de Gibbard et Walla consiste à avoir voulu rendre concrètement cette notion de distance physique, en étirant au-delà du raisonnable la durée de cette chanson. Derrière les accords de piano par lesquels débute “Transatlanticism”, on entend des percussions dont je présume qu’elles évoquent les machines d’un paquebot. La voix de Ben, bien présente, au début, s’efface légèrement, ensuite, derrière les accords plaqués sur les guitares électriques. Il a beau chanter “I need you so much closer”, les guitares ont le dessus, et le font savoir de plus en plus vigoureusement, à l’image de l’océan, dont l’immensité et la férocité séparent les amants. C’est à ce moment-là que Ben est rejoint par un chœur masculin qui ne peut qu’entonner un “Come on, come on” probablement désespéré, et qui nous dit bien que la partie est perdue.

“Transatlanticism”, la chanson, est une tentative réussie de créer une musique expressionniste, dont tous les éléments, y compris la durée, pour répondre à ma question liminaire, sont au service d’une volonté de faire ressentir à l’auditeur la souffrance physique d’un éloignement et d’une séparation, et la souffrance morale qui en découle.

 

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*voir les quelques généralités sur le sujet dans ma chronique de “Prologue” par Gentle Giant.

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