J’ai eu l’occasion d’écrire ici que Richard Thompson, compositeur, chanteur, guitariste extraordinaire est également, selon moi, l’un des plus grands, sinon le plus grand auteur de chansons britannique*.
Une nouvelle preuve en est donnée avec ce “Cold Kisses” que l’on trouve sur le huitième album de Richard, You? Me? Us?. Il s’agit également de son 5ème et dernier album produit par Mitchell Froom (ici secondé par Tchad Blake).
Il s’agit d’un double album, le premier étant plutôt “électrique”, et le second, acoustique, portant le sous-titre Nude, dans lequel il est seulement accompagné par son homonyme, le contrebassiste Danny Thompson. C’est dans celui-ci que se niche “Cold Kisses”.
La guitare acoustique fait revenir un motif circulaire qui s’articule autour d’une note unique. La tonalité obsessionnelle de cette musique vient en écho aux préoccupations dont son auteur va nous entretenir :
«Ça y est je suis dans ta chambre passant en revue tous tes trucs
Tu as dit que tu serais absente cinq minutes, c’est suffisant
Là dans ton tiroir il y a des choses en dentelle
De vieilles cartes de crédit et des perles et des bracelets et des bagues
Bon, je crois que j’ai trouvé ce que je cherchais
Dissimulée au fond du tiroir
Voilà la vie que tu menais avant
De vieilles photographies de ta vie d’avant
Bras dessus bras dessous avec Messieurs X, Y et Z
Anciens boyfriends, grands et petits
Il faut que je vois comment je peux être à la hauteur de tous ceux-là
Il y a un endroit d’où nous devons tous partir, mon amour
Qui tenais-tu dans cette tendre embrassade
J’ai trouvé une porte dans ton cœur, mon amour
Et ressens-tu encore la chaleur de ces baisers froids ?
Je suis derrière les lignes ennemies
Cherchant des secrets, cherchant des signes
Anciens boyfriends grands et petits
Il faut que je vois comment je peux être à la hauteur de tous ceux-là
Celui-là est élégant, pas très malin
Celui-là intelligent avec ses mains soignées
Plus fort que moi si on en vient à se battre
Et celui-là est un poète, un peu minable
Un peu gitan, un peu menaçant
Je me demande si elle s’est remise de lui
Vieilles passions gelées dans la seconde
Qui tenais-tu dans cette tendre embrassade
Les cœurs ont un passé qui doit être reconnu
Et ressens-tu encore la chaleur de ces baisers froids ?
Il est temps de me débarrasser de ce passé
C’est bien ton pas dans la rue que j’entends
Je noue le ruban autour de tout ça
Exactement comme je l’ai trouvé
J’entends ta clé dans la serrure
Et je sens mes joues brûlantes alors que tu me vois
Plongé dans un roman de Margaret Miller
Et ressens-tu encore la chaleur de ces baisers froids
Ressens-tu encore la chaleur de ces baisers froids ?»
Ma traduction maladroite ne rend pas bien la langue superbe et précise de Richard Thompson, et la façon admirable qu’il a de narrer une scène pas jolie-jolie, mais tellement humaine. Je connais peu de paroles de chansons (et de paroliers) qui plongent avec cette acuité dans la complexité des sentiments et des passions que tout un chacun a pu vivre. Richard Thompson, génie de notre temps.
*Voir ma chronique de “A Love You Can’t Survive”. Voir également “Beeswing” et “1952 Vincent Black Lightning”.
Merci
Oui , les paroles comme vous le dites très bien ” Je connais peu de paroles de chansons (et de paroliers) qui plongent avec cette acuité dans la complexité des sentiments et des passions que tout un chacun a pu vivre. Richard Thompson, génie de notre temps. ”
et surtout la comparaison que les hommes peuvent faire entre eux