Et Jimmy Miller vint. Six mois plus tôt, en effet, les Stones étaient plutôt mal barrés ; Their Satanic Majesties Request n’avait pas été un grand succès, et à part la splendeur “She’s A Rainbow”*, c’était assez mérité.

On connait l’histoire : en mars 1968, dans les studios RG Jones, dans le Surrey, Bill Wyman trouve une série d’accords au piano, Charlie et Brian se joignent à lui. Les deux patrons arrivent, trouvent ça chouette, et s’attribuent la paternité du truc, Keith la musique, Mick les paroles, et signent “Jagger-Richards”, comme d’habitude. Je crois que c’est vrai.

C’est donc sur le 4-pistes d’Olympic Studios, à Londres, que Jimmy Miller, les Stones, sans oublier Nicky Hopkins enregistrent cette chanson phénoménale. Keith a enregistré les pistes de guitare sur un magnéto-cassette Philips. Très simple : sa Gibson Hummingbird acoustique accordée en open de Ré, et une autre guitare acoustique en “Nashville tuning”** ; avec le son pourri de la cassette, on dirait vraiment des guitares électriques distordues. Brian est aux maracas, Keith est à la basse, Nicky joue d’un orgue Hammond avec un son distordu ; on reconnait la patte inimitable de Charlie sur sa batterie même si Keith rajoute un tom basse, et il doit y avoir un Mellotron qui imite des cuivres. Ça vit, ça pulse, ça fait du bien, et le 23 mai 1968, jour où sort le single, le monde retrouve les Stones à un niveau jusqu’alors jamais atteint. Les Stones faisaient partie de l’histoire du XXème siècle. Désormais ils appartiendront à sa mythologie.

“Jumpin’ Jack Flash” est sans doute le morceau qui a été joué sur scène le plus grand nombre de fois***, et, en général, ils terminent avec ça.

Brian Jones l’a joué une seule et unique fois le 12 mai 1968, à Wembley, et ça a été le dernier concert de sa vie.****

On trouve “Jumpin’ Jack Flash” sur de multiples compilations du groupe, et je ne vais pas toutes les lister ; je suis personnellement un assez fervent partisan de The Rolling Stones Singles Collection-The London Years de 1989 dont je vous parle à chaque fois.

Mais, il est plus intéressant de recenser quelques versions en public, et il me semble que l’une des plus anciennes est celle du Rock N’ Roll Circus (version assez lente, avec Brian). Ensuite, bien sûr, il y a la version de Hyde Park (The Stones In The Park), qui marque l’intronisation de Mick Taylor, le 5 juillet 1969. J’y étais, hi, hi, hi !

Et après commencent les grandes versions, celle du Madison Square Garden du 27 novembre 1969, qu’on trouve sur Get Yer Ya-Ya’s Out , ou celle enregistrée le lendemain pour le DVD Gimme Shelter, le concert de Houston (Tx) du 25 juin 1972 du DVD Ladies And Gentlemen (le sommet, je crois).

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Les Français font connaissance avec ces Stones des 70’s à… Bruxelles, le 17 octobre 1973, et moi, le 4 juin 1976 aux Abattoirs (l’enregistrement sur Love You Live date du surlendemain).

Après, ça m’intéresse moins, même s’il y a encore de très bonnes choses, par exemple le concert de Tokyo du 27 février 1990 qu’on trouve sur Flashpoint, ou celui du Madison Square Garden de NYC, le 18 janvier 2003 (Four Flicks). Je ne me suis même pas déplacé pour le très beau concert à l’Olympia de Paris du 11 juillet 2003 (Four Flicks) !

Citons, pour les amateurs de chiffres le concert de Copacabana (Brésil) du 18 février 2006 et son million et demi de spectateurs (The Biggest Bang), et, bien sûr, le concert du 1 novembre 2006, au Beacon Theatre de NYC filmé par Martin Scorcese (Shine A Light).

Alors, bon, c’est vrai, on a entendu JJF jusqu’à la nausée ; ça a été repris, plus ou moins bien, par des tas de gens, je ne vais pas tous les citer, Giant Sand, les La’s, les Four Tops, Peter Frampton, Brain Arthrosis, Leon Russell, Johnny Winter, Alex Chilton, Guns N’ Roses, les Flamin’ Groovies, Motörhead, Tina Turner, Thelma Houston, Aretha Franklin…, mais la flamme allumée par Jimmy Miller dans ce studio londonien carbonise tous ces gens, et c’est bien la seule et unique version des Rolling Stones qui me fait venir ce sourire aux lèvres.

*Voir ma chronique de ce titre.

**J’ai déjà évoqué ce détail technique : les 4 cordes graves de la guitare sont remplacées par des cordes qui permettent de les accorder une octave plus aigüe.

***En 2012, on en était déjà à plus de 1 100.

**** La plupart de mes informations sont empruntées au livre séminal de Martin Elliott : The Rolling Stones Complete Recording Sessions 1962-2012

 

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