J’ai déjà, dans ces chroniques, mentionné le nom de Terry Reid.*Je vais y revenir un peu plus longuement, car bien sûr, vous n’avez pas pu, au fil de ces chroniques, ne pas noter mon petit côté Zorro, je veux dire redresseur de torts. Et Terry est sans doute l’un des artistes pour lesquels il est absolument indispensable de proclamer que ─ une fois de plus ─ le monde est passé à côté de la plus belle voix que l’Angleterre nous ait donnée.

Terry fut repéré à peu près au moment où on célébrait, au sein du Spencer Davis Group, l’incroyable talent du jeune Stevie Winwood, guitariste-chanteur. Terry avait les mêmes qualités que Stevie, au sein des obscurs Jaywalkers de Peter Jay.

C’est Graham Nash, alors chanteur des Hollies, qui s’intéressa à Terry et lui fit signer un contrat chez EMI, qui aboutit à la sortie d’un single (avril 1967) sous le nom de Terry Reid & The Jaywalkers. Aucun succès, ce qui conduisit Terry à former un trio sur le modèle de Cream, lequel fut pris en main par Mickie Most, producteur des Animals ou des Herman’s Hermits. Une tournée américaine en première partie de Cream ne suffit pas à faire connaître Terry, dont le premier album Bang Bang You’re Terry Reid connut une sortie aux USA, mais pas au Royaume-Uni !

C’est peu après, que Jimmy Page lui proposa le poste de chanteur dans un nouveau groupe qu’il était en train de créer, mais Terry refusa, préférant se concentrer sur sa carrière solo, et c’est un certain Robert Plant qui en profita !

La même histoire se renouvela avec Deep Purple, qui se séparait de Rod Evans, et le refus de Terry Reid permit à Ian Gillan de se faire connaître.

Terry sortit donc son deuxième album à l’automne 1969, lequel se vendit plutôt bien aux USA. Cependant le refus de Terry d’adopter un répertoire plus “commercial” aboutit à une rupture avec Mickie Most, et l’album suivant, River (1973) ne fit pas beaucoup de vagues, ce qui décida Terry Reid à émigrer vers les USA, où son nom était un peu plus célébré qu’en Angleterre. Il y retrouva Graham Nash, désormais célèbre, et qui produisit l’album Seed Of Memory, où l’on trouve la chanson qui fait l’objet de cette chronique. J’aime beaucoup cet album dans lequel Nash, Anglais transplanté en Amérique fait profiter Terry de son expérience avec Crosby, Stills & Young.

“To Be Treated Rite” est exemplaire, en ce sens que la voix de Terry vous cloue sur place dès les premières notes, mais, en même temps, Terry, contrairement à un certain nombre de chanteurs très doués, ne fait rien pour essayer d’impressionner l’auditeur par une démonstration de virtuosité. Il interprète la chanson comme il la sent et pas pour aller à la pêche aux applaudissements. Il règne sans exhiber quoi que ce soit de clinquant. Il prend juste le risque que dans sa splendide discrétion, on ne retienne que la discrétion en oubliant la fantastique richesse qu’elle masque. C’est ce qui s’est passé, d’ailleurs…

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